Dans les semaines qui ont suivi l’annonce de la crise sanitaire mondiale de coronavirus, la Big Tech a répondu avec empressement, redoublant d’efforts pour faire le bien. Les géants de la technologie sont-ils le service public du 21e siècle ? Ou leur altruisme soudain laisse présager un double agenda ? Eclairage sur cette mobilisation sans précédent.
Début mars, l’annonce d’une pandémie mondiale de coronavirus vient assombrir l’horizon mondial. Rapidement, les GAFAM multiplient les annonces de dons, atteignant un total de 1,25 billion de dollars selon le Visual Capitalist.
Outre leurs actions coup de poing, comme les dons de masques et d’autres fournitures médicales, les géants de la Big Tech surfent sur la crise sanitaire usant de leurs ressources technologiques à des visées “altruistes”. Ils déploient des outils de test, mais également de traçage de la population ou encore de cartographie de l’évolution de la pandémie. Suite à l’appel de la Maison Blanche, ils viennent également en aide aux organismes de santé pour le partage d’informations vérifiées et de données à destination des chercheurs universitaires. L’objectif : prédire la propagation du virus et prévoir son impact sur les hôpitaux américains.
Dans cette course effrénée contre le virus, la science des données, apanage des géants de la Tech, pourtant vivement critiquée en 2019, ne parait plus si dangereuse aujourd’hui. Avec en tête la perspective de vaincre la maladie, voir “la mort”, de plus en plus d’individus sont enclins à se laisser grignoter des pans de liberté individuelle et à partager leur intimité.
La pandémie : une opportunité pour la Big Tech !
Pour mieux comprendre les motivations des géants du numérique, remontons un peu le temps. En 2019, le cabinet Frost & Sullivan a estimé à 234’5 milliards de dollars la valeur du marché mondial de la santé numérique d’ici 2023 (soit une hausse de 160% versus 2019). En comparaison, le marché de la santé au sens large (numérique, diagnostiques, soins, prothèses, etc.) est estimé à 6’500 à 7’000 milliards de dollars, ce qui correspond à environ 8,5 à 9,3% du PIB mondial !
Ainsi, il s’agit d’une véritable stratégie commerciale agressive qui se joue dans le secteur de la santé depuis quelques années. Le but de la Big Tech : être le maillon de confiance dans la chaîne “soignant-soigné”. Cependant, entre fuites de données personnelles, fake news, petits et gros scandales managériaux, abus de position dominante, la population voit noire en 2019 et la Big Tech est rappelée à l’ordre. Le “techlash” est généralisé. Aucune entreprise technologique n’est épargnée.
La pandémie de coronavirus arrive donc à point nommé pour les géants du numérique afin de revenir dans les bonnes grâces de la population. Grâce à leur force de frappe (moyens financiers et technologies), la crise sanitaire est une opportunité unique pour eux de se positionner et de conquérir des parts de marchés dans le business mondial colossal de la collecte des données personnelles de santé. Leur véritable enjeu : la surveillance généralisée des populations, ainsi que la monétisation des données personnelles via leurs applications (souvent gratuites), pour permettre de dresser des profils numériques très précis.
Dans notre prochain article, nous verrons comment la Big Tech est devenue un partenaire indispensable durant cette pandémie. Nos gouvernements sont-ils captifs des technologies de la Silicon Valley. Quelle est notre dépendance aux géants de la technologie pour sortir de cette crise mondiale ? Rendez-vous la semaine prochaine pour en savoir plus. Stay tuned !