En février dernier, à l’occasion du voyage d’études HIMSS 2019, aux États-Unis que nous avons coorganisé avec SwissEnoV, nous avons passé 8 jours riches en rencontres et en découvertes autour de l’innovation en santé. Nous vous dévoilons ici un dernier aperçu de notre périple : notre visite de la Mayo Clinic.
Pionnier, cet établissement est l’un des premiers hôpitaux à avoir implémenté le dossier patient…en 1907 déjà ! Aujourd’hui, ils parviennent à développer toute la chaîne de valeur de l’innovation : de l’idée à la commercialisation de leurs solutions.
Portrait d’une organisation hospitalière hors norme
Fondée il y a plus d’un siècle par deux médecins philanthropes, William et Charles Mayo, cette institution de pointe s’est bâtie une réputation de renommée mondiale. Aujourd’hui, l’établissement prend en charge plus d’1,3 million de personnes par an, provenant de plus de 140 pays. La Mayo Clinic génère un chiffre d’affaires annuel de 11 milliards de dollars et emploie plus de 64’ooo personnes.
Administrée par des médecins et des membres de la société civile, la fondation est à la tête de trois établissements (au Minnesota, en Floride et en Arizona), de plusieurs écoles de médecine et d’un réseau de cliniques affiliées. D’après le magazine américain Newsweek, qui publie un classement mondial des meilleurs hôpitaux du monde, la Mayo Clinic tient la tête du classement depuis 2018 ! On salue au passage la position du CHUV de Lausanne, qui a rafle la 9e place !
Toujours avoir un coup d’avance !
Depuis les débuts de l’informatique hospitalière aux États-Unis (années 60), la Mayo Clinic a placé le système d’information et le numérique au centre de sa stratégie. En 1907, Henry Plummer introduit le dossier médical personnel, avant de le rendre électronique et multisources moins d’un siècle plus tard (en 1965).
La clinique a été également le premier hôpital à conserver des informations standardisées sur ses patients. Une mine d’or amassée depuis 110 ans ! Elle investit chaque année 4 à 6% de ses revenus dans la recherche et le développement, et réalise ainsi de multiples découvertes, qu’elle monnaie ensuite aux géants de la pharmacie ou des technologies médicales.
Ces quatre dernières années, la Mayo Clinic s’est engagée dans un projet d’envergure, à savoir repenser l’organisation de la direction des systèmes d’information pour adopter une approche dite de services et une vision client-fournisseur avec les métiers de l’établissement.
Fin 2018, l’établissement a réalisé la migration de ses trois dossiers patients sur la suite complète d’Epic. Ce changement a permis de créer un bac à sable (sandbox), qui copie les données-patients de manière anonymisée, permettant ainsi de stimuler l’innovation et de faciliter les partenariats externes (start-ups et industriels).
La Mayo Clinic a également créé un incubateur qui permet aux collaborateurs et collaboratrices de tester leurs innovations et bénéficier d’une production rapide en impliquant les services, les outils et la gouvernance de la clinique. Le but de cette structure est de pouvoir sélectionner les projets sur lesquels des moyens humains et techniques pourront être ensuite alloués.
En termes d’intelligence artificielle (IA), l’objectif de la Mayo Clinic est d’approcher l’intelligence humaine pour accompagner et aider les professionnels. L’organisation recense plus de 130 projets en lien avec l’IA ou le machine learning et collabore avec IBM Waston dans le cadre des essais cliniques (pour le matching patient-essai clinique correspondant), mais également avec Google et Microsoft.
Une digitalisation des services qui touche chaque aspect du parcours patient
Lumières sur un exemple concret de l’utilisation de l’intelligence artificielle et du machine learning dans les soins aux patients. A la Mayo Clinic, chaque patient qui passe un ECG est automatiquement diagnostiqué pour un risque cardiaque, via un algorithme. Cela représente une moyenne de 4 millions de dépistages par jour !
Lire aussi : Science Daily
La Mayo Clinic dispose également de son propre service de consultation sur internet pour permettre à des médecins du monde entier d’échanger avec ses experts sans que leurs patients n’aient à se déplacer (43’000 orientations de patients). Des services qui sont facturés aux hôpitaux demandeurs. Des prestations en ligne et à moindre coût sont disponibles aussi pour les patients, telles qu’un dossier patient accessible online sur une plateforme sécurisée, le renouvellement des prescriptions, un questionnaire de pré-admission ou encore une prise de rendez-vous en ligne.
Lire aussi : TeleHeath Mayo Clinic
L’organisation hospitalière collabore également avec AWS (Amazon Web Services) pour la mise à disposition d’un assistant vocal de pré-tri des urgences et un « Symptom Checker » (vérificateur de symptômes en ligne) avec Google.
Dans le cadre de la médecine de précision, la Mayo Clinic travaille sur cinq programmes translationnels. Leurs tests génétiques sont industrialisés et vendus sur leur site Internet, à leur nom. Une étape encore rarissime pour des établissements de santé.
Leur objectif est aussi, via la médecine personnalisée (génomique prédictive, tests prénataux non invasifs, etc.), de proposer au patient le bon médicament rapidement et ainsi d’améliorer la prescription.
Lire aussi : From pharmacogenomics to pharmaco-omics – individualized care for every patient.
NEXT : La 5G est-elle réellement le Saint Graal promis ? Dix fois plus rapide que la 4G, cette dernière génération de technologie sans fil est également plus fiable. Quels impacts sont à prévoir sur le système de santé ? Décryptage dans notre prochain article.